Citations de Jacques Sternberg (courtes)

Ignorance et arrogance ne riment pas seulement, ils vont souvent de pair.
L'humour, que l'on dit la politesse du désespoir, est également la pollution de l'espoir.
Arriver tous les jours à son travail avec une heure de retard est un signe de ponctualité.
Vivre, ce n'est jamais que reculer pour mieux sauter.
On parle volontiers de l'amour fou, mais on ne trouve que l'amour flou.
Nous avons tellement de façons complexes d'aimer et un seul mot simple pour l'exprimer.
Au royaume des sourds, les aveugles sont muets.
A chaque jour suffit sa peine, à chaque être sa famille.
Contre toute la logique des lois de la physique, une femme toujours mouillée empêche l'homme de rouiller.
La faim justifie les moyens, mais on a rarement les moyens quand on a faim.
Un bienfait n'est jamais perdu, mais un vrai méfait est rarement retrouvé.
Un jour, on aura besoin d'un visa pour passer du 31 décembre au 1er janvier.
Nous sommes tous égaux devant l'inégalité qui régit notre planète.
A l'impossible nul n'est tenu et on est bien ténu devant le possible.
Les hommes vraiment pieux, on devrait en faire des clôtures.
Théoriquement, l'homme est un être humain. Pratiquement, c'est un tuyau percé aux deux extrémités.
Quand on a passé la cinquantaine, on régresse à peu près sur tous les plans, sauf celui des regrets.
Un simple moment de prédilection peut faire d'un cauchemar un rêve sans grande importance.
C'est parce que la terre est une sphère que tout ce qu'elle engendre débouche sur des cercles vicieux.
Consommer, c'est en réalité se consumer, c'est consumer toute flamme, tout désir violent, toute passion.
Le sexagénaire, s'il faut en croire le langage, serait-il enfin arrivé à l'âge du sexe ?
Il ne faut jamais désespérer puisque tout finit bien par s'aggraver.
Ca ne sert à rien de savoir des choses. L'intelligence, c'est avoir l'intelligence de ne rien apprendre.
L'occulte a toujours fasciné l'inculte.
Se mettre en ménage, c'est aller fatalement au surmenage.
Pourquoi chercher désespérément la clef du bonheur alors que, de toute façon, la serrure n'a jamais existé ?
La vieillesse, la dernière politesse de la moisissure.
On devrait être assez cynique pour faire graver à l'intérieur de son alliance la date future de son divorce.
L'homme évolue en sens inverse du lingot d'or. Il se dévalue avec les années.
Le vrai paresseux serait peut-être celui qui aurait besoin d'un autre pour dormir à sa place.
Rien mal acquis ne profite jamais.
Une fois n'est pas coutume, mais peut coûter très cher. Souvent la vie, d'ailleurs.
Peut-être qu'un jour, on découvrira que la bêtise n'est rien d'autre qu'un virus.
Les conseils qui valent de l'or rapportent rarement de l'argent.
Personne n'est plus redoutable que celui qui n'a jamais de doutes.
Un homme courtois doit, avant d'entrer dans la mort, faire passer sa femme avant lui.
Le cheval apprend à se domestiquer dans un manège ; l'homme, c'est dans son ménage qu'il apprend.
Gagner son pain n'intéresse plus grand monde, c'est garder son gain qui compte.
Scrabble : Jeu où le Q vaut encore plus cher que dans la vie de tous les jours.
On ne vit qu'une fois. Peut-être, mais cela permet d'agoniser beaucoup de fois.
Etudier la philosophie a plus de chances de changer l'homme en phylloxera qu'en philosophe.
Rien de ce que j'ai vécu ne pourra me consoler de cette certitude d'y passer un jour.
Beaucoup d'hommes ont une idée derrière la tête. Très loin derrière, presque toujours.
Une bibliothèque, c'est un des plus beaux paysages du monde.
La déclaration d'impôt peut passer pour le contraire d'une déclaration d'amour : on en dit le moins possible.
Je n'envie rien de très particulier sur cette terre. Sauf ceux qui seront encore en vie après moi.
Un laborieux castor destructif, voilà ce que l'homme est à mes yeux.
Seuls les charmes de l'inutile peuvent vous aider à supporter les horreurs de l'indispensable quotidien.
Aussi laid que ce soit, un paysage, les hommes arrivent toujours à l'enlaidir encore.
Il n'y a que deux catégories dans la société moderne : les vendus et les invendables.
Presque tous les écrivains seraient millionnaires s'ils touchaient uniquement leur pourcentage d'auteur sur les livres invendus.
C'est encore dans les cimetières que l'on fréquente le plus fort pourcentage d'êtres complètement inoffensifs.
Actionnaire : gestionnaire souvent passif de l'activité des autres.
Nous sommes condamnés, nous les Terriens, à la banalité.
Le corps humain doit être allergique à l'air puisqu'il le recrache dès qu'il en avale.
J'oublie tout, donc je suis.
La vie est le seul raccourci d'un néant à l'autre.
Tout jeune, on pousse. Adulte, on se pousse. Vieux, les autres vous poussent.
Il n'est pas nécessaire de réussir pour désespérer.
Que d'efforts pour arriver de la thune à la fortune.
Les universitaires français sont d'irrécupérables passéistes.
Empruntez la vie, elle vous rendra un cercueil.
Comment croire à Dieu qui, depuis le temps, n'a même pas le téléphone ?
Dis-moi ce que tu tais, je te dirai qui tu es.
Presque tous les faits historiques sont en réalité à base d'effets hystériques.
Si l'homme pensait davantage à la fin du moi, ses fins de mois lui paraîtrait bien dérisoires.
Le végétarien peut mourir en accord avec lui-même : à peine enterré, il bouffera uniquement des pissenlits par la racine.
Je ne m'ennuie jamais. Mais tout m'ennuie.
Il aura fallu un sacré nombre de chefs d'état pour mettre le monde dans cet état.
Les philosophes ressemblent sans le savoir aux fourrures. Tous deux attirent les mythes.
La politique, fille de la diplomatie et de l'escroquerie courtoise.
Quand on est arrivé, on est important ; quand on tente d'arriver, on est importun.
Si on te pelote le sein droit, tends le gauche.
Ce n'est pas l'homme qui est méprisable, mais ce qu'il pense.
Est-ce que la mort me consolera de ma vie ?
Je ne suis jamais entré dans un bureau sans me demander comment m'en échapper.
A combien peut-on estimer un être qu'on juge estimable ?
Il y a deux sortes de ruminants : les bovidés, qui ruminent l'herbe, et les humains qui ruminent du verbe.
Que de gens, avant le grand sommeil, traversent leur vie en somnambules.
La mort, qui a toujours tort, a raison de chacun.
La mer isole de tout et dispense des sensations qui n'ont rien à voir avec les tics nerveux citadins.
Je pense, donc je sue. De trouille, évidemment.
Les villes ne sont jamais que des ensembles plus ou moins réussis de tiroirs échafaudés les uns sur les autres.
Comment rira celui qui mourra le dernier ?