Citations de Marguerite Yourcenar (courtes)

Il ne faut pas pleurer parce que cela n'est plus, mais il faut sourire parce que cela a été.
C'est avoir tort que d'avoir raison trop tôt.
Nos défauts sont parfois les meilleurs adversaires que nous opposions à nos vices.
Je crois que l'amitié demande presque autant d'art qu'une figure de danse réussie.
Quoi qu'il arrive, j'apprends. Je gagne à tout coup.
Il faut toujours un coup de folie pour bâtir un destin.
L'amitié est avant tout certitude, c'est ce qui la distingue de l'amour.
Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts.
L'amour est un châtiment. Nous sommes punis de n'avoir pas pu rester seuls.
Personne ne sait encore si tout ne vit que pour mourir ou ne meurt que pour renaître.
Tout bonheur est une innocence.
Le silence est fait de paroles que l'on n'a pas dites.
Je ne me tuerai pas, on oublie si vite les morts.
Tout moment est dernier, parce qu'il est unique.
On n'est jamais tout à fait seul : par malheur, on est toujours avec soi-même.
Au plus profond, ma connaissance de moi-même est obscure, intérieure, informulée, secrète comme une complicité.
Rien de plus sale que l'amour-propre.
Mariage qui n'est pas une union, ni même un contact, mais qui est un rite, et sacré comme tel.
Les villes portent les stigmates des passages du temps, occasionnellement les promesses d'époques futures.
J'aime que le temps nous porte, et non qu'il nous entraîne.
Les livres ne contiennent pas la vie ; ils n'en contiennent que la cendre.
L'alcool dégrise. Après quelques gorgées de cognac, je ne pense plus à toi.
Il est difficile de rester empereur en présence d'un médecin, et difficile aussi de garder sa qualité d'homme.
Le "moi" est une commodité grammaticale, philosophique, psychologique.
Toute eau aspire à devenir vapeur, et toute vapeur à redevenir eau.
Rien n'est plus lent que la véritable naissance d'un homme.
La nature humaine change peut tout en étant capable d'une plasticité extraordinaire à l'extérieur.
Qui serait assez insensé pour mourir sans avoir fait le tour de sa prison !
On choisit son père plus souvent qu'on ne pense.
Je me suis gardé de faire de la vérité une idole, préférant lui laisser son nom plus humble d'exactitude.
Tout être qui a vécu l'aventure humaine est moi.
Je ne savais pas que la douleur contient d'étranges labyrinthes, où je n'avais pas fini de marcher.
Tout ce qui est beau s'éclaire de Dieu.
la possibilité de jeter le masque en toutes choses est l'un des rares avantages que je trouve à vieillir.
L'amitié, c'est le respect, l'acceptation totale d'un autre être.
Manier les mots, les soupeser, en explorer le sens, est une manière de faire l'amour...
Une once d'observation raisonnée vaut plus qu'une tonne de songes.
L'âge ne m'a jamais paru une excuse à la malignité humaine ; j'y verrais plutôt une circonstance aggravante.
Dans le malheur, pour autant qu'on le peut, le courage tient lieu de soleil.
Tout ce que les hommes ont dit de mieux a été dit en grec.
Une totale liberté naissait du départ.
Le courage consiste à donner raison aux choses quand nous ne pouvons les changer.
L'insolite et l'illicite, deux ingrédients indispensables de toute pornographie.
On est bien que libre, et cacher ses opinions est encore plus gênant que de couvrir sa peau.
Je suis un mais des multiples sont en moi.
La protection de l'animal, c'est au fond le même combat que la protection de l'homme.
La joie cette forme ensoleillée du bonheur.
La vie est notre seul bien et notre seule malédiction.
Quand je perds tout, il me reste Dieu.
Ce ne fut pas ma faute si, ce matin-là, je rencontrai la beauté...
Quand je considère ma vie, je suis épouvanté de la trouver informe.
On ne sait jamais, devant les nouveau-nés, quelle raison de pleurer leur fournira l'avenir.
La tendresse du père est presque toujours en conflit avec les intérêts du chef.
Laissons le choix au Hasard, cet homme de paille de Dieu.
Il y a un apaisement au fond de toute grande impuissance.
Bien plutôt qu'anthropomorphiser l'animal, l'homme a choisi le plus souvent de sacraliser en s'animalisant.
L'esprit humain répugne à s'accepter des mains du hasard, à n'être que le produit passager de chances.
Il y a mères et mères.
La victoire et la défaite sont mêlées, confondues, rayons différents d'un même jour solaire.
Tout soldat rencontré dans un lieu désert tourne aisément au bandit.
Qu'est la volupté elle même, sinon un moment d'attention passionnée au corps ?
La lettre écrite m'a enseigné à écouter la voix humaine.
La sollicitude de mes amis équivaut à une constante surveillance : tout malade est un prisonnier.
Wang-Fô aimait l'image des choses, et non les choses elles-mêmes.
J'espère que ce livre ne sera jamais lu.
On avait toujours vu les petits se faire tondre et les puissants s'emparer de la laine.
Tous les peuples ont péri jusqu'ici par manque de générosité.
La fiction a du bon : elle prouve que les décisions de l'esprit et de la volonté priment les circonstances.
Toute loi trop souvent transgressée est mauvaise : c'est au législateur à l'abroger ou à la changer.
Les conventions finissent par former les êtres.
Un triomphe ne sied guère qu'aux morts. Vivant, il se trouve toujours quelqu'un pour nous reprocher nos faiblesses.
Le désir t'a appris l'inanité du désir, dit-il;le regret t'enseigne l'inutilité de le regretter.
Tous nous serions transformés si nous avions le courage d'être ce que nous sommes.
Le bonheur n'est peut-être qu'un malheur mieux supporté.
C'est au moment où l'on rejette tous les principes qu'il convient de se munir de scrupules.
il n'est pas difficile de nourrir des pensées admirables lorsque les étoiles sont présentes.
On ne doit plus craindre les mots lorsqu'on a consenti aux choses.
Ce qui rend la pauvreté si dure, ce sont les privations, c'est la promiscuité.
On parle souvent des rêves de la jeunesse. On oublie trop ses calculs.
Il m'a toujours semblé que la musique ne devrait être que du silence.
Ne plus se donner, c'est se donner encore. C'est donner son sacrifice.
Je me refuse à faire de toi un objet, même quand ce serait l'Objet Aimé.
Mais on supporte moins facilement pour autrui ce qu'on accepte assez convenablement pour soi-même.
Avoir du mérite à s'abstenir d'une faute, c'est une façon d'être coupable.
Nous nous croyons purs tant que nous méprisons ce que nous ne désirons pas.
C'est insulter les autres que de paraître dédaigner leurs joies.
L'histoire ne s'intéresse qu'aux privilégiés.
Beaucoup d'hommes se défont, peu d'hommes meurent.
Les êtres finissent toujours par vous échapper.
Je ne sais pas à quoi nous serviraient nos tares, si elles ne nous enseignaient la pitié.
On ne traduit que son trouble : c'est toujours de soi-même qu'on parle.
Les passants me semblent avoir l'aspect vague de figures qu'on voit dans les songes.
Le monde, pour chacun de nous, n'existe que dans la mesure où il confine à notre vie.
Mes premières patries ont été des livres.
Le passé, pour peu qu'on y songe, est chose infiniment plus stable que le présent.
Le génie n'est qu'une éloquence particulière, un don bruyant d'exprimer.
Un triomphe ne sied guère qu'aux morts.
Nos oeuvres représentent une période de notre existence que nous avons déjà franchie, à l'époque où nous les écrivons.
Nous croyons à tort que la vie nous transforme : elle nous use.
Une partie de nos maux provient de ce que trop d'hommes sont honteusement riches, ou désespérément pauvres.